Atlantico m'a interviewé sur le nouvel album de Michael Jackson
lundi 26 mai 2014
Que dire... XScape, le nouvel album de Michael Jackson a déçu pas mal de fans. Le site Altantico m'a interrogé sur la question. Le lien se trouve ici :
Interview de Daniel Ichbiah sur l'album XScape de Michael Jackson
Voici le texte de l'interview d'Atlantico :
Interview sur XScape de Michael Jackon
Daniel Ichbiah, auteur du livre Michael Jackson, Black or White ? répond à nos questions.
Michael Jackson a beau être mort, son dernier album – Xscape – vient de sortir, et s'est d'ores et déjà placé dans les têtes de vente. Le batteur des Black Keys y est allé de son commentaire, et à jugé que l'album était mauvais. Qu'en est-il vraiment ?
Le public qui a vu disparaître Michael Jackson en juin 2009 a été fortement frustré puisque nous nous attendions à voir Michael revenir sur une scène après une bonne décennie d’absence. Il était à quelques semaines de se produire à l’O2 de Londres lorsqu’il a disparu. Donc, une attente est demeurée inassouvie. Par conséquent, une partie importante de public se rue sur cet album, comme pour satisfaire un manque
Pour ce qui est de XScape, oui, il y a de quoi être déçu. On n’y trouve aucun morceau qui soit à la hauteur des titres légendaires d’albums comme Off the wall, Thriller, Bad, Dangerous ou même History. Je ne pense pas qu’il corresponde à l’exigence que Michael avait lui-même notamment sur Thriller, où il avait voulu que chaque chanson ait le potentiel d’un single. Ici que dire ? Love never felt so good, ça n’est pas mal. Mais ce n’est pas quelque chose de grandiose. L’adaptation de Horse with no name, on se demande si cela méritait d’être sélectionné.
Ce n’est pas un mauvais album en soi. Mais par rapport au niveau de qualité auquel Michael nous a habitué durant sa grande période, il y a de quoi demeurer sur sa faim.
Outre la qualité intrinsèque des titres, apportent-ils quelque chose de neuf à l'œuvre du King of Pop ?
Pas vraiment. On a l’impression d’avoir une série de ‘titres secondaires’, des titres qui n’auraient pas forcément été sélectionnés à l’époque – n’oublions que pour Thriller par exemple, Quincy Jones et Michael ont écouté 900 titres pour n’en sélectionner finalement qu’une dizaine. Telle était alors leur exigence.
Quant à l’idée de faire appel à des producteurs d’aujourd’hui, je ne pense pas que c’était la bonne approche. Il aurait sans doute fallu faire à Quincy Jones pour qu’il restitue le son de Off the Wall, Thriller ou Bad. C’est ce ‘son’ très chaleureux que nous avons apprécié à l’époque. Peut-être aussi aurait il fallu employer l’équipement de l’époque. C’est ce qui a été fait pour les Beatles, c’est George Martin qui s’est retrouvé aux commandes et qui a pu restituer le son inimitable des années 60. Placer la voix de Michael sur des arrangements d’aujourd’hui, était-ce la bonne chose, je n’en suis pas sûr. Le son de 1979, de 1982, de 1987 a quelque chose de particulier. Et Quincy Jones aurait pu nous faire vibrer à nouveau avec ses cordes, ses arrangements de cuivre... Ou bien encore Teddy Riley qui était aux commandes dans Dangerous.
Comment justifier, à ce moment, que les albums parviennent à se vendre ? Quelle est la place de l'effet légende ?
Il faut savoir aussi que l’effet nostalgie joue très fortement sur certaines légendes de la pop et du rock. L’album ‘Live at the BBC’ des Beatles, des fonds de tiroir sans intérêt particulier, sorti au milieu des années 90 a tout de même été n°1 des ventes, ce qui n’était pas vraiment mérité. Le Exile on Main Street des Rolling Stones remastérisé s’est classé n°1 en 2010 alors qu’il n’avait pas atteint cette position à sa sortie. Avec le recul, on réalise que nous manquons de personnages de légende du même calibre. Il n’y a pas eu à ce jour de nouveau Michael Jackson. Prince aurait pu prendre la relève mais son conflit avec la maison de disque Sony lui a fait perdre son énergie et une partie du public n’a pas compris là où il voulait en venir.
Retrouve-t-on ce phénomène chez d'autres artistes ? Lesquels et s'agit-il de la même logique ? Finalement, y'a-t-il besoin d'un "bon" son ou d'un simple affect ?
Quand on regarde les classements comme celui du magazine Rolling Stone des meilleurs albums de tous les temps, on trouve une majorité de disques des années 60. Certes les morceaux sont souvent extraordinaires mais il y a aussi une qualité de son qui s’est perdue, quelque chose de très vrai.
Depuis le milieu des années 80, le numérique est entré dans les studios d’enregistrement. Les disques sont devenus ‘parfaits’ au niveau sonore. Les erreurs des musiciens sont corrigées à la souris sur les écrans. Du coup, il y a une nostalgie pour le temps où les musiciens enregistraient live dans le studio – ce qui était notamment le cas des Rolling Stones – sur des magnétophones à bande. Le son n’était pas parfait mais il avait une chaleur. Les musiciens non plus n’étaient pas parfaits, mais c’était hyper vivant. Quand Van Halen a débarqué dans le studio pour jouer sur « Beat it » il a produit un solo de légende, quelque chose qu’on ne peut pas vraiment refaire deux fois. Un morceau devenu légendaire comme « Like a Rolling Stone » de Bob Dylan a été enregistré dans des conditions impensables aujourd’hui, presque improvisé. Ces morceaux ont un son, quelque chose qui relève de l’authenticité. Il faudrait y revenir car les productions actuelles, trop léchées, manquent de ce côté artistique, très vivant.
Atlantico : Michael Jackson a beau être mort, son dernier album – Xscape – vient de sortir, et s'est d'ores et déjà placé dans les têtes de vente. Le batteur des Black Keys y est allé de son commentaire, et à jugé que l'album était mauvais. Qu'en est-il vraiment ?
Daniel Ichbiah : Le public qui a vu disparaître Michael Jackson en juin 2009 a été fortement frustré puisque nous nous attendions à voir Michael revenir sur une scène après une bonne décennie d’absence. Il était à quelques semaines de se produire à l’O2 de Londres lorsqu’il a disparu.
Donc, une attente est demeurée inassouvie. Par conséquent, une partie importante de public se rue sur cet album, comme pour satisfaire un manque
Pour ce qui est de XScape, oui, il y a de quoi être déçu. On n’y trouve aucun morceau qui soit à la hauteur des titres légendaires d’albums comme Off the wall, Thriller, Bad, Dangerous ou même History. Je ne pense pas qu’il corresponde à l’exigence que Michael avait lui-même notamment sur Thriller, où il avait voulu que chaque chanson ait le potentiel d’un single.Ici que dire ? Love never felt so good, ça n’est pas mal. Mais ce n’est pas quelque chose de grandiose. L’adaptation de Horse with no name, on se demande si cela méritait d’être sélectionné.
Ce n’est pas un mauvais album en soi. Mais par rapport au niveau de qualité auquel Michael nous a habitué durant sa grande période, il y a de quoi demeurer sur sa faim.
Outre leur qualité intrinsèque, ces titres apportent-ils quelque chose de neuf à l'œuvre du King of Pop ?
Pas vraiment. On a l’impression d’avoir une série de ‘titres secondaires’, des titres qui n’auraient pas forcément été sélectionnés à l’époque – n’oublions pas que pour Thriller par exemple, Quincy Jones et Michael ont écouté 900 titres pour n’en sélectionner finalement qu’une dizaine. Telle était alors leur exigence.
Quant à l’idée de faire appel à des producteurs d’aujourd’hui, je ne pense pas que c’était la bonne approche. Il aurait sans doute fallu faire appel à Quincy Jones pour qu’il restitue le son de Off the Wall, Thriller ou Bad. C’est ce ‘son’ très chaleureux que nous avons apprécié à l’époque. Peut-être aussi aurait il fallu employer l’équipement de l’époque. C’est ce qui a été fait pour les Beatles, c’est George Martin qui s’est retrouvé aux commandes et qui a pu restituer le son inimitable des années 60. Placer la voix de Michael sur des arrangements d’aujourd’hui, était-ce la bonne chose, je n’en suis pas sûr. Le son de 1979, de 1982, de 1987 a quelque chose de particulier. Et Quincy Jones aurait pu nous faire vibrer à nouveau avec ses cordes, ses arrangements de cuivre... Ou bien encore Teddy Riley qui était aux commandes dans Dangerous.
Comment justifier, à ce moment, que les albums parviennent à se vendre ? Quelle est la place de l'effet légende ?
Il faut savoir aussi que l’effet nostalgie joue très fortement sur certaines légendes de la pop et du rock. L’album ‘Live at the BBC’ des Beatles, des fonds de tiroir sans intérêt particulier, sorti au milieu des années 90 a tout de même été n°1 des ventes, ce qui n’était pas vraiment mérité. Le Exile on Main Street des Rolling Stones remastérisé s’est classé n°1 en 2010 alors qu’il n’avait pas atteint cette position à sa sortie. Avec le recul, on réalise que nous manquons de personnages de légende du même calibre. Il n’y a pas eu à ce jour de nouveau Michael Jackson. Prince aurait pu prendre la relève mais son conflit avec la maison de disque Sony lui a fait perdre son énergie et une partie du public n’a pas compris là où il voulait en venir.
Retrouve-t-on ce phénomène chez d'autres artistes ? Lesquels, et s'agit-il de la même logique ? Finalement, a-t-on réellement besoin d'un "bon" son, ou d'un simple affect ?
Quand on regarde les classements comme celui du magazine Rolling Stone des meilleurs albums de tous les temps, on trouve une majorité de disques des années 60. Certes les morceaux sont souvent extraordinaires mais il y a aussi une qualité de son qui s’est perdue, quelque chose de très vrai.
Depuis le milieu des années 80, le numérique est entré dans les studios d’enregistrement. Les disques sont devenus ‘parfaits’ au niveau sonore. Les erreurs des musiciens sont corrigées à la souris sur les écrans. Du coup, il y a une nostalgie pour le temps où les musiciens enregistraient live dans le studio – ce qui était notamment le cas des Rolling Stones – sur des magnétophones à bande. Le son n’était pas parfait mais il avait une chaleur. Les musiciens non plus n’étaient pas parfaits, mais c’était hyper vivant. Quand Van Halen a débarqué dans le studio pour jouer sur "Beat it" il a produit un solo de légende, quelque chose qu’on ne peut pas vraiment refaire deux fois. Un morceau devenu légendaire comme "Like a Rolling Stone" de Bob Dylan a été enregistré dans des conditions impensables aujourd’hui, presque improvisé. Ces morceaux ont un son, quelque chose qui relève de l’authenticité. Il faudrait y revenir car les productions actuelles, trop léchées, manquent de ce côté artistique, très vivant.
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Atlantico : Michael Jackson a beau être mort, son dernier album – Xscape – vient de sortir, et s'est d'ores et déjà placé dans les têtes de vente. Le batteur des Black Keys y est allé de son commentaire, et à jugé que l'album était mauvais. Qu'en est-il vraiment ?
Daniel Ichbiah : Le public qui a vu disparaître Michael Jackson en juin 2009 a été fortement frustré puisque nous nous attendions à voir Michael revenir sur une scène après une bonne décennie d’absence. Il était à quelques semaines de se produire à l’O2 de Londres lorsqu’il a disparu.
Donc, une attente est demeurée inassouvie. Par conséquent, une partie importante de public se rue sur cet album, comme pour satisfaire un manque
Pour ce qui est de XScape, oui, il y a de quoi être déçu. On n’y trouve aucun morceau qui soit à la hauteur des titres légendaires d’albums comme Off the wall, Thriller, Bad, Dangerous ou même History. Je ne pense pas qu’il corresponde à l’exigence que Michael avait lui-même notamment sur Thriller, où il avait voulu que chaque chanson ait le potentiel d’un single.Ici que dire ? Love never felt so good, ça n’est pas mal. Mais ce n’est pas quelque chose de grandiose. L’adaptation de Horse with no name, on se demande si cela méritait d’être sélectionné.
Ce n’est pas un mauvais album en soi. Mais par rapport au niveau de qualité auquel Michael nous a habitué durant sa grande période, il y a de quoi demeurer sur sa faim.
Outre leur qualité intrinsèque, ces titres apportent-ils quelque chose de neuf à l'œuvre du King of Pop ?
Pas vraiment. On a l’impression d’avoir une série de ‘titres secondaires’, des titres qui n’auraient pas forcément été sélectionnés à l’époque – n’oublions pas que pour Thriller par exemple, Quincy Jones et Michael ont écouté 900 titres pour n’en sélectionner finalement qu’une dizaine. Telle était alors leur exigence.
Quant à l’idée de faire appel à des producteurs d’aujourd’hui, je ne pense pas que c’était la bonne approche. Il aurait sans doute fallu faire appel à Quincy Jones pour qu’il restitue le son de Off the Wall, Thriller ou Bad. C’est ce ‘son’ très chaleureux que nous avons apprécié à l’époque. Peut-être aussi aurait il fallu employer l’équipement de l’époque. C’est ce qui a été fait pour les Beatles, c’est George Martin qui s’est retrouvé aux commandes et qui a pu restituer le son inimitable des années 60. Placer la voix de Michael sur des arrangements d’aujourd’hui, était-ce la bonne chose, je n’en suis pas sûr. Le son de 1979, de 1982, de 1987 a quelque chose de particulier. Et Quincy Jones aurait pu nous faire vibrer à nouveau avec ses cordes, ses arrangements de cuivre... Ou bien encore Teddy Riley qui était aux commandes dans Dangerous.
Comment justifier, à ce moment, que les albums parviennent à se vendre ? Quelle est la place de l'effet légende ?
Il faut savoir aussi que l’effet nostalgie joue très fortement sur certaines légendes de la pop et du rock. L’album ‘Live at the BBC’ des Beatles, des fonds de tiroir sans intérêt particulier, sorti au milieu des années 90 a tout de même été n°1 des ventes, ce qui n’était pas vraiment mérité. Le Exile on Main Street des Rolling Stones remastérisé s’est classé n°1 en 2010 alors qu’il n’avait pas atteint cette position à sa sortie. Avec le recul, on réalise que nous manquons de personnages de légende du même calibre. Il n’y a pas eu à ce jour de nouveau Michael Jackson. Prince aurait pu prendre la relève mais son conflit avec la maison de disque Sony lui a fait perdre son énergie et une partie du public n’a pas compris là où il voulait en venir.
Retrouve-t-on ce phénomène chez d'autres artistes ? Lesquels, et s'agit-il de la même logique ? Finalement, a-t-on réellement besoin d'un "bon" son, ou d'un simple affect ?
Quand on regarde les classements comme celui du magazine Rolling Stone des meilleurs albums de tous les temps, on trouve une majorité de disques des années 60. Certes les morceaux sont souvent extraordinaires mais il y a aussi une qualité de son qui s’est perdue, quelque chose de très vrai.
Depuis le milieu des années 80, le numérique est entré dans les studios d’enregistrement. Les disques sont devenus ‘parfaits’ au niveau sonore. Les erreurs des musiciens sont corrigées à la souris sur les écrans. Du coup, il y a une nostalgie pour le temps où les musiciens enregistraient live dans le studio – ce qui était notamment le cas des Rolling Stones – sur des magnétophones à bande. Le son n’était pas parfait mais il avait une chaleur. Les musiciens non plus n’étaient pas parfaits, mais c’était hyper vivant. Quand Van Halen a débarqué dans le studio pour jouer sur "Beat it" il a produit un solo de légende, quelque chose qu’on ne peut pas vraiment refaire deux fois. Un morceau devenu légendaire comme "Like a Rolling Stone" de Bob Dylan a été enregistré dans des conditions impensables aujourd’hui, presque improvisé. Ces morceaux ont un son, quelque chose qui relève de l’authenticité. Il faudrait y revenir car les productions actuelles, trop léchées, manquent de ce côté artistique, très vivant.
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Pour rappel, le livre 'Michael Jackson - Black or White' est disponible sur de nombreuses librairies et aussi en version papier sur Amazon : Michael Jackson, Black or White sur Amazon